Entretien avec Tristan Caballero-Montes, auteur d’une thèse de doctorat appuyée par ADA sur la régulation du secteur de la microfinance

29 avril 2022 Actualités
Tristan Caballero-Montes en train de défendre sa thèse en janvier 2022.

ADA a un partenariat avec le Centre Européen de Recherche en Microfinance (CERMi), hébergé par l’Université de Mons en Belgique, l’un des plus grands centres de recherche en microfinance d’Europe. Dans ce cadre, ADA a appuyé la thèse de doctorat de Tristan Caballero-Montes intitulée « Dynamique du secteur de la microfinance : analyses de la réglementation, de la concurrence et de l'action collective ». Début 2022, Tristan a défendu sa thèse en présence de la direction de ADA. Nous lui avons demandé de partager avec nous son expérience, à la fois sur le contenu de son travail et sur la collaboration avec ADA et le CERMi. 


Dans cet entretien Tristan nous explique comment « l’appui de ADA a constitué une plus-value fondamentale en termes de crédibilité » et lui a permis « de lier des contacts-clés pour réaliser différentes missions. La collaboration a permis un feedback, un soutien technique, et un partage d’expérience constants quant aux approches et résultats » liés à ses recherches. 

ADA : Depuis 2018, tu as travaillé sur ta thèse avec l’appui de ADA, dans le cadre de son partenariat avec le CERMi pour développer la recherche au profit des praticiens. Peux-tu nous dire comment s’est déroulée la collaboration avec ADA ? Quel était son apport pour la réalisation de ta thèse au fil des années ?  

Tristan Caballero-Montes : Le soutien de ADA s’est matérialisé à de nombreux niveaux. Tout d’abord, l’appui de ADA a constitué une plus-value fondamentale en termes de crédibilité de mes propositions de recherche, tant lors de l’obtention d’un poste de doctorant, qu’à l’occasion de propositions de missions de terrain. En effet, avoir un partenaire tel que ADA soutenant ma thèse a été une plus-value essentielle pour les partenaires académiques évaluant mes propositions, mais également pour les partenaires de terrain susceptibles de m’accueillir dans le cadre de mes recherches. Concernant ces derniers, en particulier, ADA m’a permis de lier des contacts-clés pour réaliser diverses missions. Ensuite, la collaboration a permis un feedback, un soutien technique, et un partage d’expérience constants quant aux approches et résultats liés à mes recherches. À de nombreuses occasions, telles que des séminaires, réunions, conférences, ou simples contacts avec ADA, j’ai pu bénéficier d’un feedback essentiel sur mes travaux de la part d’experts. À ces occasions, j’ai par ailleurs pu diffuser mes recherches et résultats, et ainsi valoriser mes travaux. Enfin, ADA a financièrement soutenu mes projets de recherche, notamment via le financement de missions de terrain, de participations à diverses conférences, ou encore l’accès à différentes formations.  

ADA : La thèse s’intitule « Dynamique du secteur de la microfinance : analyses de la réglementation, de la concurrence et de l'action collective ». À qui s’adresse-t-elle en pratique et comment les résultats peuvent aider les praticiens de la microfinance et de la régulation sur le terrain ? Peux-tu partager avec nous les points les plus importants à retenir de ton travail, ainsi que l’impact attendu ?  

Tristan Caballero-Montes : Ma thèse s’adresse aux praticiens, experts, et académiques cherchant à mieux comprendre les dynamiques sectorielles influençant la microfinance et l’inclusion financière, en particulier la régulation, la concurrence, et le rôle des associations professionnelles. Concrètement, j’ai mené quatre recherches. La première analyse le renforcement de la réglementation encadrant la microfinance au Bénin mis en place durant la période 2012-2014. Mon étude suggère que ce renforcement règlementaire n’a pas totalement rempli ses rôles de soutien à la viabilité, la performance sociale, et la diversification du marché, et propose des pistes de réflexion. La deuxième et la troisième recherches analysent ensuite un outil réglementaire particulier : le plafonnement des taux d’intérêt. En particulier, la deuxième étude identifie l’effet négatif d’une telle mesure pour l’inclusion financière, et montre que celui-ci est exacerbé par la concurrence. La troisième recherche, quant à elle, détaille les mécanismes expliquant un tel effet via une mission de terrain réalisée au sein de l’association cambodgienne de microfinance. Enfin, via l’étude du cas tanzanien, la quatrième recherche détaille des obstacles organisationnels au fonctionnement des associations professionnelles, tels que l’hétérogénéité des membres, la difficulté d’équilibrer bénéfices et coûts de participation pour chaque membre, ou encore les relations association-régulateur. Globalement, ma thèse apporte un regard original sur différents aspects de la régulation du secteur, ainsi que des cadres concrets de réflexions et de prise de décision pouvant servir aux acteurs actifs en finance inclusive, qu’il s’agisse d’agences de régulation, d’organisations soutenant le secteur, ou de centres de recherche.  


«  Avoir un partenaire tel que ADA soutenant ma thèse a été une plus-value essentielle pour les partenaires académiques évaluant mes propositions, mais également pour les partenaires de terrain susceptibles de m’accueillir dans le cadre de mes recherches. » Tristan Caballero-Montes


ADA : Pour écrire ta thèse, tu t’es rendu sur le terrain auprès des associations professionnelles de microfinance partenaires de ADA, au Cambodge et en Tanzanie notamment. Qu’est-ce qui t’a le plus surpris dans ton travail sur place ?   

Tristan Caballero-Montes : Avec le recul, il est amusant de voir que les questions de recherche identifiées ne surviennent pas toujours au moment où l’on s’y attend le plus et évoluent considérablement au fil du parcours. Un exemple est la manière dont mes première et dernière recherches – chronologiquement parlant – ont été étroitement liées. C’est en effet lors de ma première mission de terrain au Cambodge que j’ai, sans le savoir, identifié la question de recherche de la toute dernière étude que j’allais mener. En 2018, basé à la Cambodia Microfinance Association (CMA) pour étudier le plafonnement des taux d’intérêt, j’ai eu l’occasion de découvrir le fonctionnement d’une association professionnelle de microfinance, même si cela n’avait pas d’implication quant à l’objet de l’étude. Des mois plus tard, en réfléchissant à la suite de ma thèse, les initiatives menées par la CMA en termes d’auto-régulation m’ont donné l’opportunité de réfléchir à cette question des normes que définissent les associations professionnelles. Ce questionnement m’a conduit à explorer le fonctionnement organisationnel de tels acteurs au sein, cette fois, de l’association tanzanienne. On peut donc dire que, partant de la question de l’auto-régulation au Cambodge… j’ai fini par analyser le fonctionnement d’une association professionnelle en Tanzanie ! 

ADA : Après l’accomplissement de ce grand travail, à quoi vas-tu désormais te consacrer ? 

Tristan Caballero-Montes : Après avoir défendu ma thèse en janvier 2022, j’ai été accepté à la Harvard Kennedy School pour y poursuivre mes recherches pendant quelques mois. Cela me permettra d’entreprendre de nouveaux projets, tout en réfléchissant à la suite à donner à mon parcours. Parmi les projets imaginés, le rôle de l’inclusion financière et des institutions de microfinance dans la lutte contre les effets du changement climatique, ou le développement de nouvelles approches quant à l’analyse des performances des institutions de microfinance, sont des sujets qui m’intéressent particulièrement.